par Janaka Samarakoon pour artWorks! | 11/01/2024

« Thomas Merton: le Moine foudroyé »: une soirée culturelle et mémorielle à Kandy, Sri Lanka, le 2 février prochain, pour rendre hommage à Thomas Merton, moine cistercien et écrivain américain, pionnier du dialogue interreligieux dont la pensée a marqué des générations.

Invité par le Dr Jacques Soulié, hôte de cette soirée et directeur de sa programmation riche en projections, lectures, récitals et musique, j’ai le privilège de collaborer à cet événement, d’abord sur le plan logistique, puis culturel avec une exposition photographique sur l’architecture cistercienne. Cette exposition, fruit d’un voyage hivernal aux « Trois sœurs cisterciennes » de Provence, restera visible à la galerie du Centre culturel Suriyakantha pendant trois mois.

Les affiches de l’exposition photographique qui sera inaugurée lors de cette soirée

L’événement mettra en avant le lien entre le moine américain et le Sri Lanka, explorant la célèbre « Polonnaruwa Experience » née de sa rencontre avec des statues bouddhiques dans l’ancienne capitale du pays. Cette « expérience » et sa mise en récit, devenus incontournables dans les annales mertoniennes, restent l’un des sommets de la quête spirituelle de ce grand mystique originaire de Prades, dans les Pyrénées orientales.

En 1968, déjà reconnu mondialement pour ses écrits sur la spiritualité et la contemplation chrétiennes, Thomas Merton entreprend un voyage en Asie dont Ceylan (le Sri Lanka portait encore ce nom à l’époque) constitue une étape importante. Pendant ce bref séjour ceylanais, Thomas Merton s’est rendu sur le site archéologique de renommée mondiale, le Gal Vihara ou « Le temple de pierre », situé à Polonnaruwa. Sur ce site sacré, trois statues colossales du Bouddha, taillées à même dans une roche de granit, représentent l’Illuminé dans ses trois postures emblématiques : assis (en quête de la Vérité), debout (en prêchant sa Vérité), et couché (à sa mort ou le nirvana). La simple vision de ces images monumentales, marquées par des traits simples, littéralement sortant d’une masse minérale sombre comme de l’ordre émanant d’un chaos primordial, est, en soi, proche d’un miracle.

La communion que Merton a ressentie avec ces statues est à la fois spirituelle et esthétique. Spirituelle car esthétique, ai-je envie de dire, puisqu’elle transcende les frontières de la croyance, faisant de cette rencontre, vécue par un fervent catholique, une expérience somme toute universelle : indépendamment du degré de notre sensibilité à la chose divine, nous tous qui sommes à la recherche, me semble-t-il d’un absolu que l’on sait clairement verbaliser ou pas, pouvons nous retrouver aisément dans les dires du moine cistercien, tels qu’il les a écrits dans son « Journal d’Asie ».

Contemplant ces figures, je me suis soudain trouvé, presque malgré moi, projeté hors de la vision habituelle et limitée des choses, et une clarté intérieure s’est manifestée, évidente, comme projetée par une explosion des rochers même […]. Ce qui me frappe, c’est qu’il n’y a aucune perplexité, aucun problème, aucun mystère. Tous les problèmes sont résolus et tout est clair, simplement parce que ce qui importe est clair. Le rocher, toute matière, toute vie sont chargés de dharmakaya…Tout est vacuité et tout est compassion. Je ne me rappelle à aucun moment dans ma vie avoir ressenti un sentiment si profond de beauté et de force spirituelle, fondues dans une seule et même illumination esthétique. Il est certain qu’avec Mahabalipuram [Inde NDLR] et Polonnaruwa, mon pèlerinage asiatique s’est purifié et est devenu clair. Je sais et j’ai vu ce qu’obscurément je recherchais.Je ne sais ce qui me reste à trouver, mais à présent, j’ai vu à travers la surface, au-delà de l’ombre et du masque.

Voir aussi…

Dernières parutions